Dès l’automne, de nombreux arbres perdent leurs feuilles. Mais juste avant, elles sont passées par un spectre de couleurs allant du jaune au rouge en passant par l’orangé. Pourquoi les feuilles changent de couleur en automne ? La chimie y est pour beaucoup.

Les pigments cachés
Au bout des branches, les feuilles cherchent leur cible : la lumière du soleil. Elles contiennent des composés capables de capter l’énergie lumineuse, nécessaire à la production de sucre. Le principal pigment, la chlorophylle, colore les feuilles du vert que nous connaissons. Toujours renouvelée du printemps à la fin de l’été, la chlorophylle cesse d’être produite lorsque les jours raccourcissent. C’est pourquoi la couleur verte des feuilles s’estompe. À ce moment-là, nous découvrons alors les autres pigments dissimulés : flavonoïdes pour la couleur jaune et caroténoïdes pour l’orange. Présentes en réalité tout au long de l’année, ces teintes sont masquées par le vert dominant. Il faut attendre l’automne pour qu’elles deviennent visibles. La couleur rouge, elle, nait uniquement à cette époque. Avant de s’en débarrasser, l’arbre vide les feuilles des nutriments importants, comme le phosphate. Ceci modifie leur métabolisme. La dégradation des sucres mène alors à la formation de nouveaux pigments : les anthocyanes, de couleur rouge.

Faire du rouge une arme de défense
La couleur rouge n’est pas juste belle à regarder, elle est aussi un moyen de défense contre les insectes. Chaque automne, les insectes sentent le vent tourner et décident d’aller passer l’hiver au chaud dans un tronc d’arbre. Or, ce dernier qui doit déjà bien économiser ses ressources n’a aucune envie d’héberger ces hôtes. Pour se faire, il va se rendre le moins séduisant possible. Les insectes sont attirés par les acides aminés contenus dans les feuilles des arbres. À l’automne, les scientifiques ont remarqué que ces acides quittaient les feuilles et se rassemblaient vers les branches et le tronc pour renforcer cette partie de l’arbre pendant l’hiver tout en ne tentant pas les insectes, en particulier les pucerons, de se poser sur lui.

Automne en rouge ou jaune : question de géographie
Une équipe de chercheurs des universités de Haifa en Israël et de Kuopio en Finlande a tenté de comprendre pourquoi la couleur jaune domine en Europe et le rouge en Amérique du Nord. Il faut remonter très loin en arrière pour comprendre ce qu’il s’est passé. Il y a 35 millions d’années, de larges parties du globe étaient recouvertes de forêts tropicales. Au cours de leur évolution, de nombreuses espèces d’arbres se sont mises à produire des feuilles rouges pour éloigner les insectes.
En Amérique du Nord comme en Asie de l’Est, les chaînes de montagnes au sud et au nord ont protégé plantes et animaux au fil des différentes glaciations. Les insectes sont eux aussi restés sur place et la guerre entre les arbres et ceux-ci n’a donc jamais cessé. En Europe, les Alpes n’ont pas protégé les terres des glaciations ce qui a entraîné l’extinction de nombreuses espèces d’arbres et avec elles, d’insectes. Ce qui explique que les arbres qui ont survécu n’ont plus eu besoin de se parer de rouge : les insectes dont ils devaient se protéger avaient eux aussi disparu.

Les feuilles tombent, les aiguilles restent
Après avoir pris les teintes que nous leur connaissons, les feuilles finissent par tomber. En réalité, les veines qui les connectent au reste de l’arbre sont fermées depuis le début de l’automne. Dès que les ressources importantes ont été récupérées. Sous l’influence de l’éthylène produit par la plante, la connexion de la feuille à la branche se fragilise ensuite.
Des enzymes digèrent la paroi des cellules de la plante. Un coup de vent suffit alors pour que la feuille se détache de l’arbre. Ce phénomène porte le nom d’abscission. Et les conifères ? Cette famille d’arbre conserve ses aiguilles, car elles perdent beaucoup moins d’eau que des feuilles. Leur forme présente une plus petite surface d’échange qui limite les pertes. De plus, les aiguilles sont recouvertes de cire imperméable.
Les conifères n’ont donc pas besoin de perdre leurs « feuilles ». Enfin, ces arbres synthétisent des protéines aux vertus anti-gel à l’approche de l’hiver. Pour les autres, l’automne apporte donc la possibilité d’admirer des couleurs jusque-là invisibles. Bientôt, les feuillus seront dénudés et seuls les conifères conserveront encore la couleur verte.

 

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